Johanna, Finance Transformation Officer, raconte son travail sur la transformation de la fonction finance auprès de la DAF au sein de SNCF Mobilités : trouver des solutions visant l’optimisation de la performance de l’entreprise en termes de systèmes d’information, de processus, d’organisation…
Animer la direction financière : pourquoi y consacrer du temps ?
Quel est votre rôle au sein de la direction financière ?
« Mon travail est d’apporter des éléments pour que les décideurs puissent prendre leurs décisions en pleine connaissance de cause. Après avoir établi un socle commun de constats, je propose un volet de solutions et de leviers que les responsables financiers peuvent ensuite actionner comme ils le souhaitent.
Par le passé, j’ai travaillé dans des fonctions d’expertises en Finance, en Banque et dans le BTP. Depuis un an, je travaille chez SNCF Mobilités auprès du directeur financier.
Mon rôle est un rôle de support et d’animation au service des différents services financiers et de leur management : contrôle de gestion, comptabilité, fiscalité, contrôle interne, statistique, trésorerie… C’est un rôle qui vise à améliorer la performance de l’activité et la prise de décision sous différents aspects : systèmes d’information, processus et/ou organisationnels. »
La fonction finance est-elle en pleine transformation ?
« CFO 4.0, Future of Finance, big data, transformation digitale de la finance comme levier de performance, la finance plus vite, moins chère, mieux… ». Voilà beaucoup de verbatims que l’on entend dans les revues spécialisées. On le voit, la transformation de la fonction finance est là.
On le sent aussi parce qu’il y a une complexité nouvelle au sein des équipes opérationnelles. Par exemple, une complexité dans les changements de normes réglementaires : IRRS 9, IFRS 16. Des choses complexes, difficiles à mettre en oeuvre avec Excel. En effet, il faut être en capacité de produire des données qui servent à des décisions stratégiques dans des délais de plus en plus courts. On le sent aussi parce que l’on assiste à des événements nouveaux. De nouveaux entrants. En tous cas, on est dans un monde aujourd’hui qui est beaucoup plus mouvant, beaucoup plus incertain. On sent qu’il faut adapter quelque chose pour que les directions financières puissent apporter de la création de valeur.
Cela veut dire qu’en interne, il faut des processus robustes. Robustes et agiles, capables de s’adapter à ces changements et d’y répondre rapidement.
Cela veut dire aussi que l’on a un vrai sujet d’attractivité. Nous vivons dans un monde où il est tellement facile de commander n’importe quoi avec troic clics sur son téléphone. On ne peut donc plus proposer aux jeunes générations des outils lourds, peu ergonomiques. Nous avons besoin d’avoir de nouveaux outils digitaux qui répondent beaucoup mieux aux enjeux d’aujourd’hui. »
Transformation de la fonction finance : comment faire ?
« La question est : comment fait-on pour se poser les bonnes questions ?
La transformation de la fonction finance par sa digitalisation est nécessaire et enclenchée. Mais comment faire pour nourrir cette dynamique ? Je pense qu’il peut être utile parfois de se faire accompagner afin d’obtenir un regard extérieur qui challenge et oriente. Je pense qu’il y a aussi beaucoup de ressources à exploiter en interne. On a tous un rapport différent avec la conduite du changement et avec la technologie. Les personnes au sein des équipes financières qui ont une appétence pour ces projets de transformation numérique ont certainement des idées et peuvent être vecteurs de transformation. Ils peuvent créer des boucles de réflexion permettant d’avancer. Il y a plein de petites graines à semer, qui permettront, demain, un changement auprès des collaborateurs. »
Transformation de la fonction finance : les écueils à éviter
Quels sont les écueils à éviter lors d’un processus de transformation de la fonction finance ?
« Dans la transformation de la fonction finance, la technologie est bien sûr un moyen mais ce n’est qu’un moyen parmi d’autres. L’outil peut apporter quelque chose pour améliorer le pilotage de la performance, mais certaines choses relèvent aussi de l’organisation. Il faut donc avoir le discernement entre ce qui relève de la technologie et ce qui relève du reste.
Aujourd’hui, la technologie nous permet d’obtenir plus d’agilité et plus de robustesse dans le pilotage financier. Nous parlons ici de cloud, d’une puissance de calcul des machines qui a augmenté, de dématérialisation, de la blockchain… Néanmoins, nous avons souvent des difficultés à faire le lien entre le quotidien des opérationnels et ces termes qui semblent compliqués et futuristes.
Il me semble donc qu’il y a un certain nombre d’écueils à éviter.
Est-ce que la technologie répond à tout ? Je ne suis pas sûre. Par exemple, souhaite-t-on apporter une solution pour pouvoir produire des données qui, certes, sont obligatoires mais qui n’apportent pas de valeur ajoutée ? Auquel cas, on peut robotiser, automatiser.
Est-ce qu’au contraire, on pense qu’il existe des processus à forte valeur sur lesquels on préfère apporter de l’intelligence humaine parce que ça ne peut pas être modélisé ?
De même, il y a toujours cette difficulté à pouvoir convaincre sans vraiment connaître le gain qu’un outil va apporter. Nous sommes dans un monde où il est difficile de savoir ce qu’une mutation pourrait nous apporter alors que le coût sera certain et que nous sommes dans une période où les coûts sont fortement suivis.
Ensuite, il y a l’aspect humain, qui est fondamental car il faut que la greffe prenne. La transformation de la fonction finance est une réorganisation des relations avec les autres acteurs. Nous n’obtenons pas la même relation avec la direction informatique si, par exemple, on a un outil en mode Saas (software as a service) et que l’hébergement ne se fait pas au sein de la DSI. On a pas la même relation non plus quand on peut utiliser du self-BI et aller faire directement ses extractions. En revanche, on a plus que jamais besoin de l’IT pour nous éclairer dans toute cette jungle de solutions, de technologies qui sont complexes et que les opérationnels ne peuvent pas toujours s’approprier par eux-mêmes.
Enfin, cette transformation impacte également la relation à son propre travail puisque c’est, avant tout, un sujet de changement de mode de travail. »